dimanche 31 octobre 2010

fin page 23 et chapitre 7

Et dire que la prochaine fois, elle envisageait d’aller faire une campagne de fouille en Sibérie pour confirmer l'ensemble de ses théories sur la démographie préhistorique et du déplacement des premiers humains  depuis les 500 derniers millénaires.
D'après son travail entamé il y a plus de dix ans, la conclusion devenait évidente. Anua faisait remonter le peuplement des continents et de l'Amérique en particulier au moment de la dernière glaciation, celle de Würm, ce qui était officiellement admis par les scientifiques tenant de la vérité.
 Mais ce qui ne passait pas, c’était qu’elle amenait des éléments sérieux sur un peuplement beaucoup plus ancien. Anua situait cette colonisation des continents une glaciation avant, de Riss, c'est à dire quelque cent mille ans avant.
Décidément, Anua détestait ces tenants de la vérité sur un sujet où rien n'était figé et dont les thèses officielles avaient évolué plus de cent fois depuis le milieu de vingtième siècle. Elle préférait les nommer les rois des "cons-sensus". Mais même ces blagues ne la faisait plus rire !

Ces bougres de crétins qui se refusaient maintenant à admettre l’existence même son travail. Avaient-ils seulement su se poser la moindre question avant de rejeter en bloc ce fameux compte rendu de son expédition  et découvertes ?
Et dire qu'elle s'était fendue d'une lettre courtoise et bien « lèche bottes » dans le but d'obtenir une rallonge budgétaire afin de pouvoir confirmer les théories qu'elle exposait ? Anua savait maintenant qu’elle avait été d'une naïveté désarmante. Comment avait-elle pu croire en eux ?
Là pour le coup c’était foutu ! Qui voudrait la financer maintenant ? Certainement pas ces vieux tenants de l'immobilisme !
 Pour pouvoir continuer son travail, elle n’avait plus le choix. Elle devait récupérer ces fameux morceaux de bambous immortels enfermés dans son laboratoire pour pouvoir continuer à les étudier avec des scientifiques indépendants.
C’était la seule façon de prouver à l’Académie des sciences comme à son sponsor privé qui l’avait gentiment prié d’attendre que « l’affaire se calme » et de prendre une « période de repos bien méritée », les traîtres !

samedi 30 octobre 2010

suite chapitre 7 page 23 et debut 24

Ces cylindres végétaux, plus durs et résistants que la pierre étaient vivant. Alors oui, elle-même s'était posé des questions sur la validité de ses trouvailles révolutionnaires ! Si ce n'était pas un immense canular !
Mais voilà, sa fameuse intuition lui dictait qu'elle était dans le vrai. Evidement, il restait nombres de points d'interrogations sur l'origine géographique et sur la composition de ces cylindres végétaux, mais il était impossible qu'elle se trompe. Anua en était intimement convaincue et avait ébauché ses théories à partir du résultat de ses fouilles, faisant abstraction de la nature étrange de la constitution de ces sceaux-cylindres. Comme par exemple ce qu'elle remettait en question sur qui était admis généralement sur le déplacement des humains au cœur des dernières glaciations de Riss et de Würm.
Anua avait bien évidemment pris en compte l’explosion du super volcan « Toba », il y a 74000 ans qui n’avait laissé qu’environ 2 000 humains rescapés en Afrique du sud et de l’Est selon une majorité de spécialistes.
Sans compter la disparition de la presque totalité des espèces végétales et animales du fait d’un hiver « nucléaire » de près de dix années. Dix ans sans soleil pour vous réchauffer, ajouté aux anomalies magnétiques et autres astéroïdes frappant notre planète, cela pouvait justifier l’étrange composition de ces fameux cylindres de la discorde.
Elle avait donc foncé, tête baissée et se retrouvait aujourd'hui dans la pire mélasse de sa courte vie. Ah, si seulement elle avait écouté son père !
Les questions qui taraudaient Anua jusqu'à l'insomnie étaient simples. Qui, quand et dans quels buts avait-on façonné ces morceaux de bois aux propriétés si étranges ? Et pourquoi avaient-ils été ciselés de motifs classiques, d'une manière qu'on pouvait juger grossière par rapport à ses cousins moyen orientaux, tellement plus élaborés ?
Et puis, dans quel but les avait-on transportés, il y a si longtemps, au seuil de l'histoire, jusqu'au sud des Etats-Unis, à l’autre bout de la Terre ?
Elle se battrait jusqu'à la fin de sa vie, s'il le fallait, pour le savoir, elle s'en était fait le serment depuis le moment où le déluge de critiques s'était mis à pleuvoir sur elle.

Si Anua avait attendu que les caciques de l'Académie des sciences décident de la validité de sa découverte, elle aurait eu les cheveux blancs et de la barbe au menton avant de pouvoir continuer son travail. Elle avait donc décidé de passer outre et de publier ses recherches dans le magasine « Science » dont elle avait pour cela décroché la couverture. Et patatras ! Tout lui était revenu en pleine figure. Ce même journal s’excusant auprès de ses lecteurs d’avoir publié un article dont la véracité était plus que douteuse, après que la rédaction du journal eut reçu mains et mains coups de téléphones de ces pseudos éminents scientifiques.
Eux qui n'avaient dû lire que l'introduction et la conclusion du travail de compte rendu d'Anua, s'ils avaient eu le temps de retrouver leurs lunettes qui devaient se trouver sur leurs fronts, ces vieux chnoques dans leurs costumes amidonnés !

vendredi 29 octobre 2010

De nos jours pages 22 +23 (début) livre 2 chapitre 7

                                                         DE NOS JOURS



                                        CAHPITRE 7

                 ANUA PETERSEN ET LES  SCEAUX DU SOUCI


Cela faisait maintenant trois semaines qu’Anua se terrait. D'abord au fond de son labo puis chez elle depuis près de deux semaines. Deux longues, très longues semaines à se réfugier dans le travail, à tout revoir, de l’analyse de ses données aux différents éléments qui l’avaient conduite à annoncer sa découverte. Tout ça pour prouver aux vieux pontes de l'Académie des sciences qu’ils avaient torts de se railler d’elle par médias interposés.

L’Enfer depuis trois semaines à peine et déjà un sentiment de dégoût. Avant cela Anua avait surfé sur la vague du succès pour devenir la plus jeune chercheuse en archéologie à devenir membre à vie de l'Académie des sciences. Et bien sur, avec le projet le plus important en termes budgétaire que cette vénérable institution en plus de la fondation pour qui elle travaillait eut mis à disposition de quiconque.

Quand elle y repensait, elle y voyait une injustice flagrante. Comment, après l’avoir portée aux nues, pouvaient-ils la mettre plus bas que terre aussi vite. Le recul et le temps qui devraient être inhérent à leur fonction de sages, de responsables l'autorité scientifique ne s’appliquaient-ils  pas à sa personne ? Etait- elle trop rapide pour ces vieux singes ?

Son travail n’était pourtant que la suite logique de ses découvertes précédentes et similaires faites à l'Ouest de la Roumanie, non loin des rives du Danube. Non vraiment, elle ne comprendrait jamais cette bande de vieux cabots maître de la vérité. Elle les avait trouvés ces objets ! Oui, elle leur avait même montré ces fameux sceaux-cylindres, les plus vieux objets au monde prouvant l’existence de l'échange commercial, de la propriété, d’une classification sociale avancée et surtout de l’existence de l’écriture.
Mais pour son plus grand malheur, Anua les avait dénichés dans un endroit où ils n’auraient pas du se trouver. Si la Roumanie lui avait apporté un succès indéniable, il en était tout autre pour ses dernières trouvailles.
Ils auraient pourtant bien dû se rendre à l’évidence, ces vieux séniles détenteurs de la Vérité universelle ! Alors, pourquoi ces sceaux-cylindres qu’elle avait trouvé non loin des rives du Rio Grande en plein désert, à la frontière américano-mexicaine, les choquaient tant. Surtout avec la somme d’analyses et de calculs, bref, de preuves irréfutables qu’elle avait données au conseil du département d’histoire et d’archéologie américaine, à cette foutue Académie !
Bien sur, ces cylindres étaient étranges. Non, ils n'étaient pas faits des mêmes matériaux comme la plupart de leurs cousins trouvés par centaines au Moyen-Orient faits de pierre ou de métal. Ils étaient en bois et beaucoup plus longs que d’ordinaire, la grande histoire !

Bon, il fallait bien reconnaître que l’on pouvait s’interroger sur le fait que ce bois ne ressemblait en rien à ce que l'on pouvait trouver dans les espèces végétales existantes. Et oui, les espèces dont ces fameux cylindres se rapprochaient le plus étaient le roseau et le bambou. Un « roseau-bambou » qui, bien sur, n'avait jamais existé dans les régions où Anua avait fait ses découvertes et qui de plus ne montrait aucun signe de dégénérescence malgré les milliers d'années passés sous terre. Il était en effet impossible de dater l’âge de ce bois avec précision puisqu’il ne vieillissait pas ! 
Et pour cause ! Ces « sceaux-cylindres » fait de bois inconnu, une fois passés au microscope électronique, s'étaient révélés vivants. Les molécules qui les constituaient continuaient de se mouvoir et de se régénérer. Un peu comme si ce bois attendait quelque chose pour se réveiller. Là, il était comme en état d'hibernation, mais continuait de vivre à son rythme, de changer de structure moléculaire comme s'il s'adaptait à son environnement en permanence. C'était incroyable à voir mais hélas incompréhensible.

jeudi 28 octobre 2010

fin chapitre 6

Devant ce discours ferme et directif, le jeune garçon comme hypnotisé par son interlocuteur, obtempéra et monta dans la magnifique limousine sans même s’apercevoir de la taille gigantesque du véhicule. Il se dit simplement qu’au point où il en était, faire un bout de chemin en voiture ne lui ferait pas de mal et permettrait de distancer ses poursuivants. Les distancer !
Oui mille fois oui  ! ! Et quels que soient ces ennemis, ces gens qui lui avaient enlevé les seules personnes qu’il aimait en ce bas monde ! C’était la priorité de priorités. Il le ressentait de tout son être.
 Une fois le garçon installé dans la voiture, l’homme s’adressa à son chauffeur et lui donna un ordre sans qu’il ne comprenne de quelle langue il s’agissait. Puis se retournant vers lui, le vieil homme repris à son intention :
- Plus de problème p’tit gars, Te voilà hors de danger ! Maintenant c’est à toi de décider ce que tu veux faire de ton avenir.
La limousine filait maintenant dans la campagne déserte. L’homme reprit :
- Tiens, boit un peu, petit. Et repose-toi. Mais on aura le temps d’en reparler, j’en suis sur. D’abord, il faut mettre de la distance entre eux et nous et puis nous en discuterons plus sérieusement. OK p’tit gars ?
- Voui m’sieur réussit il à répondre, l’épuisement commençant sérieusement à se faire sentir.
Il ne releva pas le « nous » que l’homme avait utilisé.
- Mais comment sait-il tout ça ? Que veut-il dire quand il parle de l’avenir ! Quel avenir ?
La tête du garçon commençait à tourner. Les événements de la journée s’estompaient rapidement dans le brouillard qui envahissait son cerveau. Sans s’en rendre compte, il s’affala sur la confortable banquette de la limousine.
- Te souviens-tu de l’eau si claire ? Lui demanda l’homme coupant court aux réflexions confuses du garçon.
- Mais qu’est ce qu’il raconte bon dieu ? De l’eau claire ? Arriva à penser le garçon alors qu’il tentait vainement de résister à l’engourdissement qui le gagnait.
 La vision du jeune garçon se troublait de plus en plus. Avait-il été drogué ?
 Il ferma les yeux et emporté dans un tourbillon où s’entrechoquaient des fragments d’images de la journée puis s’endormit non sans avoir pu marmonner dans un dernier effort : Je les retrouverais, les…les frangins, hein ?
Sur ces derniers mots, il s’écroula sur la banquette, écrasé par le stress et la fatigue. Il dormait profondément, l’air enfin serein. Sa respiration était redevenue calme et régulière.
Il rêvait d’un torrent idyllique serpentant entre d’énormes rochers blancs, recouverts d’une mousse épaisse et abondante. L’eau se jetait en cascade dans une large vasque d’eau transparente illuminée parle soleil. L’adolescent se détendit et sourit dans son sommeil. Il entendait les rires des enfants qui l’entouraient et qui sautaient dans le torrent. Lui-même se jeta du haut de la cascade. Levant la tête, il vit qu’une nature vierge et abondante l’entourait. Une bienveillance émanait des immenses arbres qui surplombaient le point d’eau. Il ressentit un sentiment de sécurité qu’il ignorait pouvoir exister.
L’homme assis en face de lui était en train de sortir de sa sacoche un cylindre de bois usé et brillant au point de luire sous les phares des voitures venant en sens inverse. Il l’examina un long moment comme hésitant à en faire usage. L’homme exerça alors une pression à l’arrière de celui-ci. Une longue aiguille de couleur ivoire sortit du cylindre. L’homme approcha la pointe de l’aiguille de la tempe de l’adolescent avec une précaution toute chirurgicale. Une deuxième pression l’arrière du cylindre fit s’enfoncer la longue pointe dans la tempe du garçon endormi. Il la laissa une quinzaine de seconde en place avant de la retirer, de refermer le mécanisme et de ranger l’objet dans sa sacoche. Il regarda le garçon l’air dubitatif et lui déclara sachant qu’il n’aurait pas de réponse :
- Allez, petit ! Grâce à cela, tu progresses de centaines de milliers d’années d’évolution, alors ne m’en veut pas !

mercredi 27 octobre 2010

chapitre 6 phrase 1 page 20

VI



Courte fuite


Même si cela ne faisait que trois heures que le garçon marchait, il lui semblait qu’univers tout entier le séparait du monde où il vivait encore ce matin. Il en venait même à regretter la sécurité toute relative de la maison post Pop-Art du sac à vin.
Il était perdu dans ses pensées. Il lui fallait trouver des solutions de survie mais en était totalement incapable.
Il se retrouvait seul et savait qu’il était recherché par de nombreux ennemis. Ses amis, son clan ? Ils ne les connaissait pas. Il devait donc se méfier de tout le monde !
Qu’allait-il faire maintenant ?
Comment pourrait-il oublier qu’il avait senti quelque chose juste avant que l’accident ne se produise sans qu’il ne fasse rien pour prévenir sa mère ! Il serait pour toujours le responsable de sa disparition. En plus, il n’avait su garder les mômes avec lui. Plus il tournait ces sombres pensées dans sa tête plus il se sentait minable. Incapable de faire quelque chose correctement.
Il ressassait à tel point sa responsabilité, se reprochant sa nullité dans les évènements de la journée, qu’il n’entendit pas la voiture approcher et se ranger à sa hauteur sur le bord de la route. C’est seulement quand il entendit la voix qu’il tourna la tête.
- Allez mon gars, c’est dur mais pas la fin du monde, pas vrai ?
- Tirez-vous ! J’attends ma mère et elle aime pas que je cause à des étrangers, répliqua sèchement le garçon sans même tourner la tête, continuant d’avancer.
- T’as pas entendu, mon gars ? Regarde par ici un instant s’il te plaît !
Interloqué par la fermeté du ton employé par l’homme dans la voiture, il se décida à regarder de quelle bouche ces paroles sortaient. Il vit alors le visage d’un homme d’une soixantaine d’année à la barbe parfaitement taillée, la chevelure argentée qui dépassait de la fenêtre. Mais ce qui le marqua le plus, c’était le regard vert sans cesse en mouvement du vieil homme. Un regard vif et dur mais qui à l’inverse d’inspirer la crainte, respirait la gentillesse, la simplicité. Le vieil homme lui inspira de suite confiance. Non, cet homme ne lui voulait aucun mal.
Il se sentit alors obligé de dire quelque chose.
- Et comment vous savez que c’est pas la fin du monde, articula t’il difficilement la bouche sèche, se retenant de fondre en larme
- Parce que tu le sais très bien que cela allait arriver. Et cela depuis fort longtemps. Bien longtemps avant ce drame, l’explosion et ta décision de continuer ta route. Ouais p’tit gars ! Tu sais depuis fort longtemps que tu ne dois pas te laisser prendre par nos ennemis. Tu sais parfaitement au fond de toi que j’ai raison. Laisse ton instinct te guider, p’tit gars. Tu sentira que tu peux me faire confiance, pas vrai ?
Sans lui laisser le temps de répondre l’homme ouvrit la porte posa un pied à terre, laissant apparaître un costume coûteux et des chaussures de villes impeccablement cirées. Le contraste était saisissant avec les pauvres guenilles qu’il portait. Après quelques secondes de silence, il ajouta
- Tiens, prend ça ! Sèche-toi le visage, en lui tendant un mouchoir qui lui servait de pochette, et grimpe dans la voiture. . Ca s’rait d’ailleurs une bonne idée de couper ta tignasse et de te trouver des vêtements un peu plus corrects si tu veux vraiment continuer de passer incognito. Pas vrai p’tit gars ?

mardi 26 octobre 2010

capitre 5 fin

Le portable ayant retrouvé sa place à côté d’elle, la jeune femme entama quelques centaines de mères plus loin un magnifique tête à queue, traversant la séparation centrale de l’autoroute puis les autres voies de circulation pour s’immobiliser net sur la bande d’arrêt d’urgence de l’autre côté de l’autoroute. Cette manœuvre insensée créa l’effet escompté : l’affolement général des automobilistes et une cascade de coups de freins, générant une panique totale dans le trafic. Des dizaines de véhicules partant en tout sens, zigzaguant et s’accrochant les uns, les autres avec plus ou moins de «bonheur». Une fois sa fidèle monture immobilisée, Carla en sortit prestement et se mis à retraverser à pied l’autoroute sans se presser pour s’arrêter sur le terre plein central au moment où un énorme camions bleu venait de percuter de plein fouet le vieux pick-up qui avait attiré son attention quelques secondes avant qu’elle ne sème la panique dans le trafic routier somnolent de cette lourde fin de journée d’été. Elle ne quitta plus des yeux les restes fumants du véhicule maintenant en miettes. Chaque morceau de la vieille guimbarde faisait l’objet de toute capacité de concentration. Quand plus rien ne bougea, Carla se précipita vers ce qui restait du pick-up, ouvrit la portière de la passagère et se saisit du couffin prenant le temps de s’assurer que les bébés étaient encore bien en vie aussi rapidement qu’un médecin urgentiste.

Elle se dirigea ensuite vers la cabine broyée du poids lourd, posa avec douceur le couffin par terre avant d’arracher le conducteur encore à moitié inconscient de son siège pour le projeter violemment d’une main ferme et professionnelle sur la terre du sous bois où le camion avait fini sa course, encastré dans un arbre.

Tout se passa alors trop vite pour qu’aucun des nombreux témoins ne puisse certifier à cent pour cent ce qu’ils virent.
Ils affirmèrent cependant tous qu’après avoir entendu un cri effroyable de la part du chauffeur du poids lourd, la jeune femme se releva, du sang coulant sur le visage, prit d’une main ferme une sorte de panier et repartie tranquillement vers son véhicule. Elle redémarra ensuite sue les chapeaux de roues pour prendre la bretelle de sortie qui se trouvait à une centaine de mètres de là. Dans les dix secondes qui suivirent le départ de la jeune femme le camion et tout ce qui se trouvait dans un rayon de cent cinquante mètres se désintégra dans une explosion dont le fracas s’entendit à plus de douze kilomètres.

La police ne retrouva la Camaro qu’une demi-heure après, abandonnée dans un champs de maïs. La femme, le couffin et le probable bébé qu’il contenait plutôt mort que vif vu la violence de l’accident semblaient s’être volatilisés. Les différents barrages de police dressés sur l’ensemble des routes du secteur ne donnèrent rien.
 
La plupart des corps et des véhicules ne purent être identifiés tant la violence de l’explosion avait été importante.
Le seul embryon de piste qui restait, fut l’arrestation de deux jeunes enfants. Des témoins et l’hélicoptère de la police, envoyé en renfort, qui au départ essayait de retrouver une voiture volée plutôt dans la journée, les avaient vu sauter en compagnie d’un adolescent d’une vieille camionnette quelques instant avant l’accident. Malgré un important dispositif, là encore la police ne put jamais mettre la main dessus. On entendit plus jamais parler de lui dans la région.
Après un mois d’enquête infructueuse, le chef de la police du compté fut contraint de démissionner suite au tir tors de barrage des médias régionaux. L’accident ayant provoqué la mort d’au moins huit personnes parmi les automobilistes se trouvant sur les lieux de l’accident et au moment de l’explosion qui en provoqua, lui, plus de trente. Cela sans compter les occupants du pick-up dont le nombre exact de personnes à bord reste toujours inconnu à ce jour.
Les enfants récupérés, un peu plus loin sur l’autoroute, sont restés trois jours en observation à l’hôpital. Semblant en état de choque, ils n’ont fourni que très peu d’informations mis à par leurs prénoms et le fait qu’ils étaient en route pour faire les courses.

dimanche 24 octobre 2010

chapitre 5, page 16

V

Carla Allifesh.


Si sa mémoire était bonne, ce dont elle doutait fortement, ça faisait bien longtemps qu’elle ne s’était pas sentie aussi bien. Tout se déroulait exactement comme elle l’avait prévue.
Bien calée dans le siège baquet de  sa « Camaro », les cheveux au vent, c’était du pur plaisir. Ah les décapotables ! Même si le siège se trouvait être trop bas pour elle, putain de dieu que c’était bon de s’éclater comme au bon vieux temps !
Ben oui, on n’a pas toujours le temps de choisir le modèle qui vous mettra le plus en valeur quand il s’agit de dérober en moins de trente secondes une voiture sur un parking de supermarché.
Lancée à plus de 180 Km/H, slalomant sur toute la largeur de l’autoroute entre les camions, voiture et autres mobiles-homes nombreux en cette fin d’été propice aux migrations de populace. Carla se sentait enfin redevenue elle-même. Elle se fit d’ailleurs la remarque que quelques mois de « congés » de ce type lui ferait le plus grand bien. Terminées dit elle à voie haute, les longues journées assise sur un transat à siroter des cocktails en regardant l’immensité de l’océan et du vide de sa vie. Fini la marmaille braillant et les jeunes couples enlacés estampillés « just-married » dans des hôtels qu’ils ne pourraient s’offrir à nouveau que pour leurs vingt ans de mariage avec trimage intensif pour y arriver si leurs couples tenaient jusqu’à là.
Concentrée à l’extrême sur sa conduite, elle arborait cependant un large sourire en s’imaginant les événements qui devaient suivre d’ici à la fin de la journée.
-Se la jouer fine et récupérer le gros lot ! J’ai pas intérêt à me rater si j’veux pas me retrouver une nouvelle fois sur la touche, dit-elle en se remémorant le coup de fil qu’elle avait reçu en fin de semaine dernière qui lui annonçait sa participation à une nouvelle mission. Bref, qui signifiait son retour sur le devant de la scène.
Bien sur, les sirènes de police l’inquiétaient quand même un peu malgré l’habitude qu’elle avait de gérer ce type de situation. Mais ce qui la tracassait d’avantage c’était le son de rotor d’hélicoptère qu’elle discernait depuis un bon moment. C’était un petit désagrément dont elle se serait volontiers passée avant d’avoir récupéré le colis. Elle n’avait pas envisagé de rencontrer si tôt ce genre de problèmes dans le plan qu’elle avait élaboré depuis le mail salvateur qu’elle avait reçue il y à peine 72 heures. Si le but de la mission était clairement indiqué, Carla avait une totale liberté d’action pour arriver au but qu’on lui avait fixé.
Heureusement le temps jouait en sa faveur. Pas le temps de gamberger sur le pourquoi du comment, l’heure était à l’action !
Eclatant d’un rire aussi sonore qu’incongru à la vue des risques fous qu’elle prenait en conduisant de la sorte, Carla plongea la main dans la poche de son blouson en cuir pour en sortir ses trois fétiches. Sa flasque de vodka chromée, dont elle but sans attendre une bonne rasade, son pistolet automatique qu’elle arma et son téléphone portable.
 Alors qu’ils atterrissaient tous trois sur le siège passager, elle planta un violent coup de frein. Elle venait de voir, furtivement, dans le rétroviseur, trois formes sauter d’un vieux pick-up et s’engager au pas de course sur la voie d’accès de l’autoroute.
Rapide dans sa prise de décision, Carla décida qu’elle se préoccuperait d’eux plus tard. Elle repris de la vitesse et empoigna son téléphone. Elle pressa sans lâcher le volant la touche de rappel et marmonna quelques mots sur un ton qui ne laissait guère de doute à son destinataire sur l’importance de lui obéir. Son interlocuteur devait agir maintenant, il en avait tout intérêt et en avait parfaitement conscience !

Chapitre 4 page 15

ACCIDENT

Le chauffeur de l’énorme poids-lourd raccrocha le téléphone, embrassa la croix qui se balançait au rétroviseur et saisit le petit boîtier de télécommande sur la plage avant. Il hésita quelques secondes et appuya sur l’unique bouton de la commande à distance, sachant pertinemment que cela était un moindre mal pour lui et sa famille. S’il réchappait de ce qui, allait suivre, il se jura de ne plus jamais faire monter de femme sur le couchage de la cabine de son camion. Cette fois le prix avait été trop fort à payer. Beaucoup trop fort !
PAN !
Le camion se mit soudain à zigzaguer dangereusement. Le pneu avant droit venait d’éclater. Le chauffeur eut le mauvais réflexe de freiner trop fort, privant ainsi la gigantesque machine de toute direction. Le camion déjanta, fonça tout droit en direction du pick-up en traversant le terre plein central de l’autoroute sans ralentir le moins du monde malgré les efforts désespérés du chauffeur. Il percuta le vieux véhicule de « gnôle-man » à l’avant droit et continua sa route, écrasant littéralement dans sa course meurtrière, une voiture de sport, une familiale et un quatre-quatre. Il continua sa route, fracassant la barrière de sécurité et s’engouffra dans le sous-bois avant de s’encastrer dans un sapin. Le moteur toussota, rejetant un nuage de fumée noire puis s’arrêta de tourner.
La voiture où se trouvait sa mère commença, au moment de l’impact, à entamer une série de tours sur elle-même avant de basculer sur le côté. Des morceaux du vieux pick-up volèrent en tout sens pendant qu’il continuait sa glissade. Le garçon pu distinguer furtivement que la plus grande partie du capot, des ailes et de l’habitacle avaient disparu au moment ou la voiture traversa à son tour la séparation plantée d’herbe de l’autoroute. Perdant de la vitesse la vieille camionnette ou ce qu’il en restait fut percutée violemment par une berline de luxe noire et brillante dont le conducteur n’eut pas le temps de juger de sa folle trajectoire. Les restes de tôle glissaient dans une traînée d’étincelle sur le bitume avant de s’arrêter ou d’être percutés par d’autres véhicules comme sur un gigantesque tapis de billard. Un motard, au mauvais endroit au mauvais moment, s’envola en rencontrant une des portes du pick-up. Ce n’est que deux cents mètres plus loin que les diverses épaves fumantes s’arrêtèrent enfin. Le silence ne fut alors troublé que par quelques crissements de pneus provoqués par des conducteurs arrivant sur le lieu du carambolage et voulant éviter de se rajouter au carnage qui se présentait à leurs yeux.
C’était fini. Il n’y avait plus rien à voir. Le garçon laissa traîner encore quelques instants son regard, revoyant le sourire énigmatique de sa mère dans le rétroviseur alors qu’il sautait de la camionnette. Puis, comme elle lui avait appris depuis longtemps, il se re-concentra en se fixant un objectif précis : Les « frangins ». L’esprit à nouveau clair, il décida de ce qu’il fallait faire. Se tirer de cet endroit au plus vite.
Il saisit fermement chacun des deux enfants par la main et les entraîna rapidement de l’autre côté de l’autoroute vers le sous-bois et sa pénombre salvatrice.
Plus rien ne les retenait là. Il lui fallait mettre d’urgence une distance suffisante avec le lieu de l’accident où l’on avait pu les voir avant de pouvoir songer à l’avenir.
Avenir dont sa mère et les jumeaux ne faisaient plus partie vue les restes déchiquetés du pick-up. Des véhicules et les cris des premières personnes qui essayaient d’intervenir pour tenter de porter secours aux victimes de l’accident éparpillées sur une longue bande d’autoroute retentissaient. Toute circulation serait impossible pour un bon moment. Autant en profiter. Le garçon décida de traverser l’autoroute et, tenant toujours les gamins par la main, commença à marcher d’un bon pas sur la bande d’arrêt d’urgence
Ils étaient l’avenir. Sa mère et ses nombreux "tantes et oncles" qui avait eu l'occasion de rencontrer au hasard des nombreuses pérégrinations qui avaient ponctué sa jeune existence, n'avaient eu de cesse de le lui répéter. Mais surtout, il le ressentait violemment dans l'ensemble des cellules qui constituaient son être.
Ne pas se tromper pour eux trois relevait de sa responsabilité dès cet instant. Et il espérait que cela serait pour un long moment. Soudain, il fut écrasé par ce nouveau fardeau. Le doute l’envahi un instant avant qu’il ne déclare d’une voie faussement assurée :
-Allez, en route les « frangins » Tout droit, c’est toujours tout droit qu’il faut aller. Et la tête haute, non d'une petite souris! Tenta t il pour détendre l'étau qui lui oppressait le sternum plus que pour faire rire les enfants. Et n’oubliez pas ce qu’on a appris ensemble !

Ils partirent tous trois, aussi vite que les jambes des petits leur permettaient d’avancer, essayant de mettre le plus de distance possible avec le lieu du carnage routier qui bouleversait encore une fois cette satanée destinée.
Cet avenir trouble et incertain qu’il aurait à bâtir lui, le pré-pubert, orphelin qui devait disparaître au plus vite avec deux jeunes enfants. Et pour couronner le tout, il fallait échapper à un ennemi que la seule personne capable d’identifier venait de mourir.
- Maman, maman dans quels draps me suis-je fourrés !
Après quelques centaines de mètres, ils ralentirent l’allure. L’adolescent, laissant les deux enfants à leurs jeux, éclata en sanglots, pleurant enfin de longues minutes à chaudes larmes. Sa mère lui manquait déjà tant.

samedi 23 octobre 2010

chapitre 3 page 13

III

Allons faire les courses en famille



En cette fin de matinée d’été chaude et humide, ils se rendaient au supermarché pour faire les courses destinées à les sous-alimenter une bonne semaine. Sa mère n’allait encore prendre que le strict nécessaire pour les jumeaux couchés dans un panier sur ce qui faisait office de banquette arrière au pick-up. Faire les courses, consistait essentiellement à faire le plein de toute boisson dont l’étiquette signifiait bien la mention alcool avec si possible des slogans du genre « dont l’abus est dangereux pour votre santé ».
Ce jour là, il avait pris sa décision. Il y avait pensé toute la nuit. Faut dire qu’avec la tannée qu’il avait pris la veille, le sommeil avait été long à trouver.
Sauver au moins les deux bambins et lui-même en sautant du véhicule dès qu’il ralentirait suffisamment pour que les « frangins » ne puissent être blessés. Pour sa mère et les jumeaux, le garçon avait tout mis en place : fuir, rester à proximité de la « ferme » et intervenir quand le « Barbare » serait endormi du sommeil du juste ivrogne. Après ? S’enfuir le plus loin possible de cet endroit maudit. Même s’il lui fallait pour ça traîner sa mère par les pieds.
 A cet effet, il avait déjà dérobé le double des clés de la camionnette et ne doutait pas un seul instant de parvenir à conduire ce véhicule si l’habituel conducteur y arrivait dans l’état d’ébriété constante où il se trouvait.
D’un seul coup l’adolescent sentit monter une forte nausée puis une boule dans la gorge qu’il ne connaissait que trop bien. Quelque chose allait se passer, c’était imminent. La dernière fois qu’il avait connu de sensations d’une telle ampleur, c’était il y a environ trois ans avec sa tante Louise, c’était du moins comme ça que sa mère l’appelait.
Tante Louise commençait à escalader ce qui allait se révéler son dernier escabeau alors qu’il jouait à l’étage. Dans son tailleur élégant, provenant directement des derniers défilés parisiens, sa chère tante Louise, une ampoule à la main, glissa sur l’avant dernière marche et chuta lourdement sur le somptueux carrelage en marbre de carrare. Si elle eut le réflexe de lever le bras, gardant ainsi l’ampoule intacte, elle ne sut jamais que son ampoule allait finir classée dans un sachet plastique comme pièce à conviction, remisée dans les archives de la police. Il garderait toujours en mémoire ce contraste saisissant entre le sang qui s’échappait de son cuir chevelu et le blanc immaculé du sol lorsqu’il la découvrit. Mais là, à cet instant cela n’avait rien de comparable. Durant un instant, le garçon cru bien qu’il allait tomber dans les pommes.
Il tentait à cet instant de surmonter sa nausée et de se redresser comme il le pouvait alors que la voiture freinait pour amorcer son virage d’entrée sur la bretelle d’autoroute. Il fut à cet instant repris de terribles vertiges et faillit passer par-dessus le rebord de la plate forme du pick-up tant son corps était secoué de spasmes nerveux. Sa vue se brouilla un dixième de seconde. Les yeux révulsés, l’adolescent eut une vision distincte. Un énorme monstre bleu et argent, brillant de mille feux, fonçant à la vitesse d’une comète dans sa course folle. La boule de feu jaillissant de la gueule béante du monstre engloutissait tout ce qui présentait à elle, hommes-pantins et objets roulants en tout genres. Le tout, dans un vacarme sonore digne de l’apocalypse.
Le garçon retrouvant une partie de sa vue par au prix d’un douloureux effort, sentit toute l’urgence de la situation. Même si ces images sorties tout droit de sa tête ressemblaient fort aux BD de mangas japonais qu’il affectionnait de lire avant leur installation chez « soûlard le barbare ». Ces images lui intimèrent de passer à l’action malgré une « forte migraine ». ah, ah ! Il ne voyait encore que d’un œil, et encore tout flou avec une magnifique couleur sépia.
Il fit l’effort de se redresser et tendit sa main qu’il savait tremblante sous l’effet de son mal de crâne en direction des enfants qui le regardaient inquiets. Il leur enjoignit fermement de le rejoindre, ramassa deux vieilles couvertures qu’il leur tendit en leur enjoignant de bien les garder en boule devant eux et leur dit de se tenir prêt. Les deux bambins obtempérèrent sans piper mot en constatant le ton caverneux de sa voix, la blancheur de son visage et son regard vitreux.
Alors que le pick-up s’arrêtait au stop pour traverser la route et s’engager sur la bretelle d’autoroute, le jeune garçon su que le moment de changer leurs destins était venu. Il empoigna les enfants comme il le pouvait passant ses bras sous leurs aisselles, leur répétât de bien maintenir leur couverture devant leur visage et avec une force étonnante pour son age, les souleva par les aisselles et sauta de la voiture.
Sa chute se passa pour lui comme au ralenti. Alors qu’ils étaient encore en l’air, il croisa le regard de sa mère dans le rétroviseur. Il lui sembla à la fois doux et plein d’encouragements. Mais surtout il avait tout d’un regard d’adieu. La réalité repris vite ses droits quant ils s’écrasèrent tous trois dans l’herbe du bas côté de la route. Après un long roulé-boulé, ils s’arrêtèrent enfin en bas d’un talus. L’adolescent s’assura que les deux petits n’avaient rien et après avoir repris son souffle, leva la tête vers la camionnette qui entrait sur l’autoroute.
C’est en regardant sa mère s’éloigner qu’il aperçu du coin de l’œil, un fantasmagorique semi-remorque bleu aux par choc et calandre chromés brillant sous le feu du soleil apparaître au loin sur l’une des voies inverses. L’inquiétude le submergea instantanément.

Ils descendirent la bretelle d’autoroute et partirent à contre sens en avançant aussi vite que le permettait les petites jambes des « frangins ». L’adolescent ne cessait de se retourner, de regarder en arrière, dans la direction du pick-up où se trouvait encore sa mère. Le garçon poussa soudainement les petits dans l’herbe. Le monstrueux camion venait de les croiser. Il savait pertinemment que quelque chose de terrible allait se produire. Le dernier regard qu’il avait eu de sa mère laissait maintenant flotter dans son esprit à la fois un sentiment d’une tristesse infinie et d’une passation de témoin.

vendredi 22 octobre 2010

fin chapitre 2

Qu’il n’aille pas à l’école, il pouvait le comprendre, cela lui était déjà arrivé par le passé. Mais que sa mère accepte d’être une esclave domestique et serve de punching-ball jusqu’à ce qu’il soit obligé d’intervenir et dérouiller à son tour pour rien ! Pour qu’à la fin, ils soient tous deux tabassés jusqu’à y rester à terre, inerte et juste assez conscient pour ne plus bouger. Non vraiment, il ne comprenait plus rien !
Il lui fallait agir ! Pas besoin d’être devin pour sentir l’urgence de la situation. Surtout depuis qu’il avait entendu « beau-papa » discuter au téléphone, sûrement avec oncle Linen, vu son ton courtois et déférent. Il était question entre autres d’un départ au printemps prochain pour la côte est. Si c’était de leur départ dont il s’agissait, le printemps prochain paraissait une date dépassant largement la date limite de consommation. D’ici là, ils seraient déjà partis mais les pieds devant. Alors oui, il lui fallait agir. Au moins tenter quelque chose pour éviter le pire.

Sa décision était prise. Il se devait de profiter de la première opportunité qui se présenterait. Pour la première fois de sa vie, il n’avait rien dit de ses projets à sa mère. Il ne voyait pas d’autre issue à cette situation, sinon la mort. De qui ? La sienne, celle de sa mère ou comme il le désirait de plus en plus, celle de cette brute dégénérée.
Le garçon n’attendait plus qu’une occasion. Il devenait urgent qu’une opportunité se présente car il n’était pas sur que lui et maman puissent encaisser encore un an sans dommage irréversible les coups de poings, de bottes et de tout ce qui passait entre les mains de ce primitif.
Cependant depuis une bonne dizaine de jours il faisait chaque nuit des rêves d’une autre vie. Des frissons le parcouraient sans cesse, sans qu’il n’arrive à déterminer s’ils venaient en réaction des coups reçus ou comme des signes annonciateurs d’un changement, du passage à l’action. Mais voyant sa mère résignée comme il ne l’avait encore jamais vu, il redoutait que le changement ne puisse se dérouler sans qu’il n’ait à agir seul. Et cela lui faisait peur tant il était habitué à toujours demander l’avis de sa mère.

C’était à lui d’être sur ses gardes pour éviter tout incident si quelque chose devait se produire. Il était maintenant assez grand pour savoir que sa mère avait accepté de ne pas mettre les voiles avant la date fixée, si celle-ci, qu’il avait entendu au vol d’une conversation téléphonique, les concernait bien. Sans compter que ses frissons, sensations, rêves et autres sueurs froides indiquaient le plus souvent une partie de la vérité future, il le savait maintenant depuis plusieurs années. Même s’il n’arrivait pas à mettre un terme exact sur ce qu’il ressentait, ces signes annonçaient quelque chose de mauvais du genre changement radical. Ou alors ce n’était que les signes que son corps douloureux et couvert de bleus ne tiendrait plus longtemps.
-Ouais ! c’est plus pas possible et faut qu ’ça change. Il avait terminé ses réflexions là dessus, ballotté à l’arrière du pick-up, sur le chemin de « Pochtron-ville ».

jeudi 21 octobre 2010

chapitre 2 jusqu'à page 10

II

UN JOUR COMME LES AUTRES



Le garçon marchait sur le bas côté de la route depuis plus de deux heures. Le paysage fait d’une succession de champs de maïs aux plants maigrelets et autres cultures desséchées par ce long été torride se transformait en ombres mouvantes au fur et à mesure que la nuit tombait. Les montagnes posées sur la barre d’horizon finissaient de donner le ton à ce panorama infini et un tantinet angoissant pour celui qui prenait le temps de le regarder.
Il ne voyait rien de tout cela. Il était totalement absorbé par ses pensées. Il se replongeait dans les évènements qui l’avait amené jusqu’à cette route. Son esprit avait cette faculté de faire remonter à la surface des souvenirs incroyablement précis. En contre partie, sa conscience du présent disparaissait totalement. Une soucoupe volante aurait pu se poser devant son nez qu’il ne s’en serait pas aperçu.


Ah, cette merveilleuse période de sa vie !
Il boudait, râlait, pestait, pour ça oui ! Et pour la millième fois ! Et oui, il se refusait à pardonner encore une fois à cet abruti l’alcool, les insultes, les humiliations et surtout les coups. S’il voulait la guerre, il allait l’avoir… ce vieux chnoque, cette bourrique mal embouchée !
Cela ne pouvait plus durer, ni pour sa mère ni pour lui pas plus que pour les « frangins » ou les jumeaux. Il s’en faisait le serment, il allait les tirer de cette triste vie qui les menait tout droit vers la désintégration.
Le garçon, calé à l’arrière du pick-up entre bâches, couvertures élimées et divers petits engins agricoles en très mauvais état comme le personnage à qui ils appartenaient, ressassait encore de sombres pensées après la «dispute» de tout à l’heure.
Heureusement cette engueulade n’avait pas dégénérée en « guerre des tranchées » grâce au manque de carburant, le précieux alcool du cogneur en chef. Son envie de refaire le plein au plus vite l’avait stoppé nette dans sa quête de violence.
Les petits ne pipaient mots et étaient collés l’un contre l’autre, face à lui à l’arrière du pick-up. Ils semblaient encore sous le choc de la violente altercation de la veille et de la scène de la matinée.
Le jeune adolescent se sentait responsable de leur sécurité. Il lui fallait absolument se débrouiller pour qu’ils ne soient pas eux non plus pris dans cette tourmente de violence. Cette sombre période avait commencé quand sa mère avait emménagé avec « un homme qui serait d’un grand secours le moment venu ». C’est tout ce qu’elle avait accepté de dire avant que l’enfer ne commence à s’abattre sur eux. Avant qu’ils n’emménagent chez l’homme des cavernes dans toute sa splendeur. Depuis, malgré ses questions répétées avec insistance, sa maman lui faisait comprendre le sens de l’expression : « No comment ». Elle aussi courbait l’échine et essayait comme elle pouvait d’éviter les affrontements avec le néandertalien. Et cela se révélait aussi simple que de traverser les chutes du Niagara sur une corde à linge !
-Non c’est plus possible, faut qu’j’arrive à sortir maman et les enfants de cet enfer !
Tout en parlant à voix basse sans s’en rendre compte, il repensait à cette période, la plus noire de sa vie.
Il avait fallu trimer du lever au coucher du soleil à des tâches abrutissantes pour le corps et l’esprit pour entretenir « le ranch », un peu comme dans la série télé « la petite maison dans la prairie » mais en version gore. Et ça c’était la partie facile de cette vie. Parce qu’une fois rentré à la ferme il fallait supporter les soirées où la télé était loin de jouer son rôle de catalyseur d’attention. Elle gisait au sol dans un coin du salon depuis une bonne semaine. Depuis le moment où beau papa l’avait achevée à coups de pelle la prenant pour cible hallucinatoire après « qu’un sale coyote ne se soit introduit dans la maison ». Il avait déclaré cela, tout fier de lui, un filet de bave coulant au travers de son large sourire édenté après avoir tué « l’animal », achevé les derniers grésillements du tube cathodique.
- Si seulement il avait pu s’électrocuter, le poivrot ! Les petits ne pouvaient même plus s’évader un peu par la petite lucarne de la tempête perpétuelle qui agitait leurs vies en regardant une émission pour enfants ou un documentaire sur le réel mode de vie chez les « gens normaux ».

Ah la ferme ! Cette bâtisse gisait là, au milieu de rien, au milieu d’une étendue infinie de champs racornis par un été trop long, trop sec.
Elle ressemblait plus à la cabane du grand méchant loup dans les dessins animés qu’à une réelle habitation. Avec ses longues planches clouées essayant de masquer les trous des murs, les restes de peinture bleu azur qu’on discernait encore par endroits et ses fenêtres cassées réparées par de larges bandes de plastique de toutes les couleurs. Il fallait le reconnaître, Mister Bibine possédait l’art du recyclage des déchets industriels et autres objets du moment qu’ils ne coûtaient rien. Ouais il fallait la voir pour y croire! On nageait vraiment dans la quatrième dimension !
S’il ne s’était pas senti d’humeur aussi morose, il en aurait volontiers rigolé. Non décidément, cette ferme n’avait rien du havre de paix campagnard qu’il avait imaginé quand maman l’avait prévenu de leur prochaine destination. Le garçon n’avait pas non plus imaginé qu’en plus des corvées du jours, bonnes pour le corps et l’esprit selon l’homme qui les hébergeait, il y aurait à subir les « cours du soir ».
Ce surnom qu’il avait donné aux « veillées familiales » arracha un sourire à l’adolescent. Sourire qui ressemblait plus à une grimace de douleur tellement hier soir, « papa », comme sa mère lui avait demandé de l’appeler, du moins en public, n’y avait pas été de main morte. Son visage tuméfié et le reste de son corps douloureux étaient des rappels constants de l’urgence de la situation.
Mais il tenait bon et mettait toute son énergie à défendre les enfants, ce qui ne le rendait pas peu fier de lui tant les occasions de baisser les bras étaient nombreuses. En plus, ce combat pour les petits lui évitait de penser à des fuites définitives du style coupage de veine ou pendaison.
 Ils étaient quatre, les mioches. Les jumeaux et surtout les « frangins ». Agés de cinq et trois ans, ils étaient arrivés le même jour que lui et sa mère à la « ferme des horreurs ». Et bien vite le jeune adolescent s’était juré de tout faire pour éviter que cette période ne les traumatise à vie. Il avait donc édicté avec les deux enfants un certain nombre de consignes pour leur éviter le pire. Sa mère, elle s’occupait de protéger des deux bébés, il le voyait bien à la manière dont elle les couvait. Elle ne les connaissait pas mieux que lui, puisque oncle Linen en personne s’était chargé de les confier à maman deux jours avant leur départ pour ce lieu de paix et de sérénité qu’était « le ranch ». Mais son expérience de mère et son instinct surdéveloppé, protègeraient les jumeaux de l’alambic ambulant.

Si pour l’instant les « frangins » n’avaient pas été touchés dans les affrontements, c’était uniquement parce qu’il avait rapidement fait appliquer les règles du « tu ne m’attraperas pas le monstre » dès que la brute avinée était à la maison. Le jeu consistait alors à se rendre sur l’un des cinq « plateaux d’invisibilité », cinq lieux sûrs et suffisamment éloignés du « monstre-poilu-à-grandes-dents », et de n’en sortir uniquement qu’au moment du repas. Le gagnant étant celui des deux bambins qui avait su rester « invisible »jusqu'à ce que l’adolescent ne vienne les chercher.
Ce stratagème avait pour l’instant porté ses fruits, les deux enfants n’ayant presque pas pris de coups. Il faut dire que son « charmant papa » ne cherchait pas à se faire apprécier des enfants par une attention de chaque instant ni par sa volonté de se montrer comme un beau-père aimant et tendre. On pouvait lui rendre justice, l’hypocrisie ne faisait pas partie de ses défauts ! Comme il l’avait dit dès la fin de la première semaine, il se foutait des mioches, ne voulait pas les voir ni entendre le moindre son sortir de leur bouche. Et qu’on compte pas sur lui pour s’occuper en plus des « p’tits gueulards » avait il ajouté, agitant un pack de bière à la main. De cette phrase mémorable, le garçon avait bien compris que le maître des lieux parlait des deux enfants et des jumeaux qui d’après sa mère n’avait que six mois. C’est à ce moment qu’il s’était juré de les tenir au maximum à l’écart des coups et autres objets volants qui avaient commencé, dès leur arrivée, à tomber aussi dru que les mauvaises herbes poussent au printemps.
Mais pourquoi donc sa mère avait pu envisager une seule seconde que cette cohabitation aurait la moindre chance d’être bénéfique pour eux, non d’un chien ! Comment cette brute labellisée « pur malte » pourrait leur être d’une quelconque utilité ? Même à jeun, ce qui était rare, il n’ouvrait la bouche que pour menacer sa mère ou lui promettre de funestes châtiments si ses ordres extravagants n’étaient pas suivis à la lettre.
Il avait fallu rapidement faire une croix sur le futur et d’essayer de faire projets d’avenir. Il n’était question que de survivre, de s’adapter et de subir. Les mêmes journées, les mêmes soirées, les mêmes moments de folie, de violence gratuite. Voilà le quotidien qu’il fallait supporter. Et ce quotidien commençait sérieusement à peser lourd !
- Comment maman avait elle bien pu accepter de s’embarquer dans cette galère ? Cela devait bien faire mille fois que l’adolescent se posait cette question. Il s’était d’ailleurs juré de demander un jour des comptes à ce fameux oncle Linen sur le pourquoi de leur regroupement dans cet enfer. Enfin, bien évidemment dès qu’il lui aurait la possibilité de rencontrer ce Monsieur dont il ne connaissait que le célèbre : « Allo ! Salut petit ! Tu me passes ta mère s’il te plaît ? ». Cela quand il décrochait par curiosité le téléphone, transgressant ainsi les règles sacrées de la vie avec sa mère.
- Maintenant ils se retrouvaient à sept sous le même toit, dans le trou du cul du monde ! Faudrait qu’un jour elle aussi lui explique cette parenthèse dans leur passage en ce bas monde. Si la stabilité n’avait jamais été le maître mot de leur vie passée, elle n’avait jamais connu de sommet de méchanceté et de misère humaine comme ces derniers temps.
Il lui avait toujours fait une absolue confiance dans ses choix, mais là, il n’y comprenait plus rien.
Pourquoi étaient ils partis de leur « super nouvel appartement » en ville pour venir s’installer dans ce trou noir terrestre seulement trois semaines après que sa mère eut rencontré « le king of the vinasse ». Lui qui entretenait les espaces verts de l’école dont elle était la nouvelle sous- directrice ? Pourquoi avait il du quitter ce splendide collège dont il était lui-même élève pour se retrouver à « castagne ranch » ?
Et pour quoi ce déménagement précipité après qu’oncle Linen eut téléphoné de son confortable triplex de Parc Avenue alors qu’il était intervenu en personne auprès du rectorat pour qu’elle obtienne ce fameux poste? Madame  « La-sous-directrice ». Ça en jetait autrement mieux que « Miss-sous-bonniche » du sac à vin, non ?
Ces questions le rendaient fou et il évitait d’y penser se concentrant sur son morne quotidien.

mercredi 20 octobre 2010

fin chapitre 1

Les deux petits gamins prirent leurs jambes à leurs cous et plongèrent dans l’herbe en s’esclaffant. L’adolescent, l’air grave, les regarda faire avant de remonter sans perdre une seconde la pente en ciment de la pile du pont pour se mettre derrière, bien à l'abri, de manière à pouvoir observer les gamins.
C’est à ce moment qu’un frisson le parcouru. Comme lors de « l’accident ». Ne se fiant  plus qu’a son instinct, il décida de remonter plus haut, passant même par-dessus la barrière, s'écorchant au passage les mains, pour se retrouver sur la route enjambant à cet endroit l’autoroute sur laquelle ils marchaient jusqu’à là.
Dommage que les gamins ne puisse escalader cette barrière, regretta t’il en regardant les barbelés fixés en haut  du grillage et l'état de ses doigts ensanglantés. Mais là, il devait se protéger, il le sentait. De cette manière, il était sur de pouvoir se sauver si les frangins se faisaient attraper. Et il était prêt à en mettre sa main à couper que cela allait arriver. La sueur qui lui coulait le long de la nuque ne l’avait jamais trompée jusqu’à ce jour. Cela aussi loin que sa mémoire lui permette de remonter.
La voiture de police passa devant eux et sembla disparaître lorsqu’elle se rangea vivement sur la bande d’arrêt d’urgence et stoppa nette, coupant sirène et moteur. Alors qu’un silence étrange régnait quelques instant, le garçon couché sur le trottoir du pont, vit presque simultanément les deux bambins se redresser, se figer avant de replonger lorsque la voiture de police entama une marche arrière. Quatre autres véhicules de police apparaissaient à quelques centaines de mètre de là, côte à côte, barrant l’autoroute et avançant sans se soucier des limitations de vitesse, gyrophares allumés et sirènes hurlantes.
- Mais quel crétin ! Pourquoi j’ai pas pensé à changer de route avant ! Y’avait qu’à monter sur un pont comme je suis maintenant, on y serait arrivé si j’avais vraiment voulu et s’en aller par les petites routes, bon dieu ! Y’en a tous les cinq cents mètres, quel abrutit je fais, c’est pas possible. C’était simple d’y penser, quand même ! S’auto-flagella t’il.

L’adolescent n’attendit pas de voir ses « frangins » se faire embarquer dans les véhicules pour commencer à se mettre en marche sans se presser. Sûr des réponses que feraient les enfants, tout du moins jusqu’à ce qu’on les conduise à un poste de police pour les entendre.
Il ressentit même un soulagement mêlé de honte à se voir ainsi libéré d’une telle responsabilité.
- C’est certain que je m’en sortirai mieux tout seul pour le moment. Mais quand tout le bazar se sera calmé, je les récupérerais et je m’occuperais d’eux. On continuera à vivre ensemble jusqu’à ce qu’ils soient grands. Ouais, je l’jure !

En même temps, sachant parfaitement que ce ne serait pas aussi simple, il se fit le serment de les revoir un jour, et de leur révéler la vérité. Enfin de la toute petite partie de vérité qu’il avait pu glaner depuis qu’il était petit.
Il s’éloigna vers l’Est, il sentait le soleil lui réchauffer le dos. Il fredonnait sans s’en rendre compte : « tout va bien, je vais bien, tout va beau, il fait beau…… » Une comptine que sa mère fredonnait quand il n’était encore qu’un enfant comme un autre...

mardi 19 octobre 2010

ENFANCE chapitre 1, pages 1 et 2

I    ENFANCE


Chapitre 1


FUITE



-Je suis un meurtrier, je le savais non ? Et comme ça, comme un lâche, je l’ai laissé mourir ! 

J'ai tué ma mère. 
Mais pourquoi n'ai-je rien fait pour la sauver ! C’était pas sorcier non d’un chien !
Il repensait à sa mère, sa chère maman qu’il ne reverrait plus, tout comme aux jumeaux, deux adorables bébés sans défense qu’il avait laissés derrière lui sans se retourner. Il s’en voulait à mort pour cela. Il savait cependant au fond de son âme qu’il n’avait pas d’autre choix. A l’inverse, il ne se sentait pas du tout triste pour le ravagé du cerveau qui l’avait poussé à suivre son instinct, par la vie cataclysmique que leur avait imposée cette brute avinée.
- Un assassin, un pauvre minable de lâche d’assassin. Voilà ce que je suis !
Ces phrases et quelques autres du même acabit lui trottaient dans la tête depuis maintenant plus de deux heures. Deux heures à marcher sur cette vacherie de bas côté d’autoroute et avec deux gamins qui ne se rendaient compte de rien ! Il aurait aimé avoir en ce moment leur âge, à les regarder jouer comme si la vie se déroulait à l’instant présent.
Mais le moment était, il le sentait, plus à l’urgence qu’à la rêverie. Il lui fallait s’éloigner le plus vite possible plutôt que de penser à des âneries comme disait maman ou de revenir sur le « carnage » qui les avait mis tous les trois dans cette situation.
-Allez, les frangins ! Venez près de moi ! Si vous voulez qu'on ait une chance de rester ensemble, faites exactement comme je vous l’ai dit, non d'un chien ! Leur intima-t’il autant pour eux que pour se donner du courage et ne plus penser à ce qui s’était passé tout à l’heure.
Dehors, alors que l’orage se terminait, l’air se remplissait de l’odeur des herbes en train de sécher après un long été ensoleillé. Quand l’orage avait éclaté, ils avaient trouvé refuge sous la pile d’un pont qui enjambait de l’autoroute.
 Malgré le vacarme du trafic automobile, le garçon commençaient à s’assoupir, accroupi, le dos appuyé contre le béton encore chaud de l’énorme pilier. Son blouson roulé en boule lui servait d’oreiller. Seuls ses cheveux longs et bouclés, son jean et son T-shirt noir qui lui collait à la peau, encore trempés l’empêchaient de plonger dans un profond sommeil. Les paupières lourdes, Il laissait son esprit vagabonder encore un peu sur les évènements qui s’étaient enchaînés depuis le début de la journée. Il gardait néanmoins toujours un œil toujours sur les petits.
Après une bonne minute d’étirement, il décida qu’il était temps de songer à se remettre en route, de fuir le plus loin possible.
Vers où et comment, ça n’était pas d’actualité pour le moment.


****

Alors qu’ils s’étaient remis en marche, l’adolescent, longiligne à qui l’on aurait volontiers donné treize ou quatorze ans avec son mètre soixante-dix et ses grands yeux au regard triste, essayait de remettre de l’ordre dans ses pensées. Il ne voulait pas se laisser déborder par ses sentiments, le chagrin et la peur de l’avenir.
-D’abord eux et puis moi, D’abord eux et puis moi, ouais à moi plus tard ! Faire comme maman a dit! Les mettre en sécurité, c’est facile à dire mais qu’est ce que je vais faire d’eux…Bon sang  ! Marmonna-t’il à voix haute sachant parfaitement que les petits ne l’entendraient pas pris qu’ils étaient par leurs jeux faits de courses et de cris.
Il ne voulait pas se l’avouer mais il sentait qu’il perdait de sa vigilance à mesure que la fatigue, la faim et l’angoisse le gagnaient.
 En regardant les deux bambins qui se trouvaient dix mères devant lui, il songea :
- En voilà deux pour qui la vie n’était pas devenue un problème ! Instantanément, un sourire apparut sur ses lèvres sans qu’il ne rende compte.
-Eh, les frangins ! Revenez un peu par-là, lança t’il. Qui veut terminer les chips ?
Les deux gamins se regardèrent un instant avant de partir au pas de course vers le paquet bleu et rouge qu’il venait de sortir de sa poche de pantalon et qu’il agitait aussi haut que ses bras lui permettait.
Pendant que les deux enfants dévoraient ce qu’il restait du vieux paquet de chips, l’attention du jeune adolescent fut attirée vers la sirène dont le son s’amplifiait à mesure que la voiture se rapprochait.
- Stop ! intima t’il aux bambins.
Les deux paires d’yeux se fixèrent immédiatement sur lui. Il continua prenant soin d’adoucir le son de sa voix comme pour jouer au « secret qu’il faut garder si on se fait attraper ».
-Vous vous souvenez des consignes, hein ! Vous entendez la sirène, pas vrai ?
Les deux petits hochèrent de la tête en même temps.
-Qui est capable de me les redire ?
Et les deux bambins de répondre à l’unisson : « on a perdu la voiture de maman et papa quant ils se sont arrêtés parce qu’ils se disputaient pour la route. Alors on est descendu, juste pour voir dehors et la voiture est repartie… » C’est ça, hein ?
Et pour moi ? ajouta le garçon
-Si t’es avec nous, on vient juste de te rencontrer et si tu te caches bien et que personne te voit, on dit rien sur toi jamais-jamais c’est juré-craché,  expliqua tout fière le plus grand des deux enfants.
Le garçon réussit à sourire, acquiesça avec un air complice destiné aux « frangins », et ajouta :
-vous entendez la sirène qui se rapproche ? Voilà ce dont il faut se méfier. Alors on fait comme pour les autres, hein ? Dès qu’elle se toute proche, vous irez vous cacher dans l’herbe, là, à côté du pont et moi, je serai plus haut, derrière le « gros-poteau-gris » pour vous surveiller. Si la voiture s’arrête, vous courrez vers elle et dites au policier ce que vous venez de me dire….. Et n’oubliez pas de pleurer, ok ?
C’était la quatrième fois qu’une sirène se faisait entendre puis passait sans même ralentir. A chaque fois le jeune garçon retenait son souffle puis criait qu’il fallait se cacher. les deux »frangins et lui-même plongeaient alors instantanément dans les hautes herbes du bas côté de l’autoroute. Il espérait tant que la nuit arrive et qu’il trouve une échappatoire facile d’accès pour les petits à cette maudite autoroute. « De leur sécurité dépend l’avenir » répétait souvent sa mère. Il repensa à la décision de fuir qu’il avait pris pour la première fois sans lui en parler.
Il repris ses esprits, la sirène retentissant beaucoup trop fort. Il cria :
-Allez, tout le monde se cache. Vite la sirène est forte. Un, deux, trois, courrez, courrez vite !

lundi 18 octobre 2010

pages 2 et 3

Nous, les végétaux supérieurs, n’avions que peu de temps devant nous ! Hélas, mille fois hélas, la rapidité n'est pas notre fort !
Il faut dire à notre décharge que les minéraux, ces pauvres tas de cailloux, se vengeaient de nos railleries sur leur immobilisme. Ne voilà pas que ces amas de pierres destinés à redevenir poussière prenaient un malin plaisir à bouger, à émerger du fond des mers puis à y retourner au gré de cataclysmes dont ils ont seuls le secret.

Il était déjà trop tard ! Le mal était fait. Dans notre précipitation à trouver le meilleur moyen pour sortir de l’eau et d’évoluer en gardant nos inestimables caractéristiques, nous avions commis l'irrémédiable ! La création de l’ordre animal ! Eux aussi faits de chair et de sang, enfin, faits de leur chair et de leur sang !
Rien à voir avec nos spécificités uniques destinées à régner sans partage sur cette boule que vous nommerez bien plus tard la Terre !

Nous le reconnaissons volontiers, tout ce patacaisse est entièrement de notre faute
Un peu trop de fer dans notre système circulatoire et le sang était né. Au départ fort proche de nous, en terme de composition, ce système sanguin permit l’apparition de ces êtres fourbes, imprévisibles et gesticulateurs. Vous les nommerez "Animaux". Tu parles ! De sacrés empêcheurs de tourner en rond, oui !

Et comme si ça ne suffisait pas, ils se sont permis de se multiplier et de se différencier à vitesse grand "V".
En tous les cas, beaucoup trop rapidement pour nous, nom d'un chrysanthème ! Nous n'avons rien pu faire. La faculté d'adaptation de ces olibrius sur pattes, ou pas, dépassait de loin nos maigres facultés de réaction.

Des animaux apparaissaient maintenant chaque jour ! Et oui ; nous, végétaux de toutes espèces, étions maintenant menacés par de nouveaux rivaux. Pourtant, jusqu’alors, nous étions les plus rapides.
C’est vrai que les minéraux n’étaient guère réputés pour leur célérité. Si nous en plaisantions depuis le fond des âges, nous comptions quand même sur eux pour ne pas trop se déplacer. Sinon ou aurions-nous pu nous accrocher pour vivre et nous développer ?
Alors quelques-uns parmi-nous, les végétaux supérieurs, décidèrent de partir la haut, à la hâte, sur la terre, pour échapper à ces monstres grouillants que nous avions engendrés par mégarde.

C’est sous la forme de petites mousses et de lichens que nous nous sommes arrimés la haut, sur le sol. Exactement comme nos frères de l'ordre végétal qui s'étaient sacrifiés en stoppant leur évolution pour permettre la notre là-haut, hors de l'eau. Une fois conquise, la terre nous offrait un espace réservé rêvé pour nous épanouir. Nous nous sommes diversifiés, tant et si bien, que rapidement plus un centimètre carré ne pouvait échappe à notre conquête. Nous avions un nouvel espace où évoluer sereinement !

Une partie d’entre nous s’est de nouveau sacrifiée pour fabriquer l’oxygène nécessaire à la survie de l’organisme nos têtes pensantes, de nos espèces dirigeantes. Magnifique don de soit qui vous permet d’admirer chaque weekend lors de vos promenades nos vaillants ouvriers, les arbres.
Mais elles ne restaient pour nous que le moyen d’arranger ce pauvre amas de rocaille qu’était au départ notre petite terre.
Là bonne marche de notre plan de conquête était à ce prix puisque ces satanées bestioles s’étaient invitées, elles aussi, sur nos terres émergées, mettant en danger notre existence. C'est que ça n'arrête pas de respirer ces animaux, et sans aucune contre partie pour le bien être des autres habitants de la planète.

Nous avions pourtant bien réfléchi, tout planifié avec soin. Mais la capacité d’évolution des animaux nous a pris de vitesse. Nous ne pouvions aller plus vite. Il faut que vous compreniez que notre raisonnement n’est pas individuel mais collectif.
Nous, les végétaux supérieurs, sommes tous reliés et la moindre décision prend énormément de temps. C’est la clé de notre supériorité sur ces bestioles volatiles et superficielles, rampantes, courantes et volantes en tous sens, engagées dans une lutte chaotique pour être à la pointe de leur misérable évolution.
Nous, c’est l’inverse ! Nous partageons tout. Des systèmes nerveux et sanguins qui sont communes à toutes nos espèces, courent en réseaux infinis pour aboutir à une stratégie de développement mûrement réfléchie commune à nous tous.
A peine avions nous mis au point un système de reproduction impliquant nos «chères bêbêtes» et l’ingestion par elles de notre nouvelle invention, la graines que… Vlan ! Il était déjà trop tard !

Le temps que les tapis de mousses qui nous relie les uns aux autres nous fassent parvenir les différentes informations et voilà que ces maudits animaux ne nous trouvent plus à leur goût ! Ils ne veulent plus de nos graines, trop pauvres en apports nutritifs et trop proche de leur propre système corporel, nerveux et circulatoire. Ils se refusent à manger notre semence et donc à les disséminer.  Ils se contentent de nos cousins, simples végétaux.

Plus de descendance, plus d’avenir ! Et en moins de temps qu’il ne faut pour qu’une de mes branches ne pousse assez pour caresser ma bien-aimée et voilà que notre territoire s’est réduit comme une peau de chagrin. Quelques larges vallées, le rift africain, c’est tout ce qui nous reste.
Bien pire encore ! Les aléas climatiques de notre planète, avec ses périodes chaudes puis glacées, nous font disparaître de nos derniers sanctuaires et nous obligent à nous réfugier sous le sol, sous forme de graines, attendant l’arrivée d’un hypothétique sauveur…

Mais même les animaux commettent des erreurs.

Ils ont engendré ceux qui s’appellent les hommes ! Mais personne à cette époque ne pouvait imaginer leur pouvoir de nuisance qui alliait inventivité et manque de réflexion à long terme, le tout, mâtiné d’égoïsme forcené. C’était maintenant à nous de dresser ces drôles de nouveaux bestiaux à deux pattes. Agiles comme ils sont, il est certain qu’ils vont pouvoir nous rendre ce que leurs ancêtres nous ont enlevé.

CETTE PLANÈTE EST NOTRE !