lundi 13 décembre 2010

Chapitre 23, suite

D’un seul coup son nom vint interrompre sa réflexion et celles bon nombre d’autres personnes attablées.

-      Claude ! … Claude Mazère! Par ici ! S'exclama Nick, de sa voix gutturale. Il l’appelait  bien trop fort à son goût, mais l’émotion qu’il ressentait à cet instant lui faisait perdre tout contrôle. Il joignit le geste à la parole et se mit à agiter ses larges battoires, bras levés, menaçant de faire exploser le système d'éclairage surbaissé à cet endroit du bar.
Une bonne partie de la clientèle se retourna surprise par le volume et la sonorité des sons sortant de la gorge du colosse gesticulant assis au fond de la salle. L'usage voulait plutôt que l'on chuchote, en ce lieu.

Claude dut rendre les armes et fixa Dorlan en affichant un sourire forcé et plein de gêne. Il se dirigea vers l'homme qui continuait de secouer sa main et de beugler son nom, à sa grande désolation, lui qui aimait tant se fondre dans le paysage, ne pas se faire remarquer.
Et voilà qu'il se sentait comme éclairé par un halot de lumière, un peu comme une rock star en plein concert. Malgré cet accueil plus que déconcertant, il tenta de paraître aussi sûr de lui que possible.
La main qui s'abattit sur son épaule au moment où il tendait la sienne pour saluer son interlocuteur, acheva de le déstabiliser. Surpris par la force de ce geste, trop amical et inattendu, Claude trébucha sur le pied central de la table basse et tituba quelques secondes, menaçant de fracasser le mobilier du bar. Par un effort désespéré, il réussit à retrouver son équilibre.
Nick remarqua, quant enfin ils se serrèrent la main, que son jeune protégé était aussi rouge que la moquette qui recouvrait le sol.

Enfin, après tant d'année d'attente et de recherche, il allait pouvoir mieux connaître Claude et même peut être pouvoir s'en rapprocher pour longtemps pour peu qu'il accepte l'offre qu'il allait lui faire.

-      Salut Claude, comme on dit chez-vous ! Dit Nick dans un français parfait. Excuse la maladresse de mon accueil mais je ne me suis jamais fait aux décalages horaires. Ces satanés trajets au-dessus de l'Atlantique me font perdre tous mes repères sociaux ! Se sentit-il obligé d'ajouter, piquant à son tour un fard.

Le regard interloqué du jeune homme fit hésiter Nick quelques secondes. Vite, une excuse, pensa t'il avant de continuer
-       Le verre que je bois là depuis que je vous…t'attends, correspondrait à un double whisky que je m'enverrai derrière la cravate en me réveillant à six heures du matin… Enfin si j'étais alcoolique, ce que tu pourrais penser que je suis…Et puis zut ! Je t’en prie, asseyons-nous, termina t'il en constatant, consterné, le ridicule de son discours.

Même l'excuse de l'emploi de la langue française ne pouvait justifier une entrée en matière aussi calamiteuse. Il s'agissait quand même au départ d'un entretien professionnel de la plus haute importance. C'était quand même officiellement et pour une bonne part le prétexte de cette deuxième rencontre. Mais, pour le coup c'était mal parti et il aurait du mal à rattraper le coup. Heureusement qu'il restait l'argument massue de ce que contenait la petite boîte qu'il avait dans la poche.

Il s'en voulait de s'être laisser surprendre par les flots d'émotions refoulées depuis si longtemps. Et encore, s'il s'était écouté, il aurait pris Claude dans ses bras pour une longue étreinte et lui ébouriffer les cheveux !

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire