mercredi 17 novembre 2010

chapitre 14, 2 pages, suite

Ils attendirent dix minutes comme prévu, discutant de ce qu’ils allaient faire de leur argent si facilement gagné quand l’un d’eux se retourna et dit
- T’as entendu ?
- Entendu quoi ? Répondit l’autre
 -Là, des craquements devant l’ambulance ! Allez démarre, on se tire d’ici et en vitesse ! J’suis pas à l’aise à la cambrousse, moi !
- T’es complètement parano mon pauvre ! C’est qu’un petit renard ou une autre bestiole, pas le monstre du Loch Ness fillette ! Mais t’as pas tort. Filons d’ici et allons nous jeter un godet ou deux en ville en attendant de toucher le pactole. Mais fais gaffe à ce que tu dis. T’as toujours eu tendance à trop parler, pas vrai ?
- C’est vrai que j’ai jamais vu un job aussi facile, Ajouta le deuxième infirmier en ouvrant la porte de l’ambulance.
Les deux hommes à bord, le chauffeur fit tourner la clé de contact. Le moteur toussota puis s’étouffa avant de s’arrêter. A chaque nouvelle tentative, le moteur gémissait de moins en moins fort. Le chauffeur furibard, regarda son compère et beugla :
- Qu’est-ce que c’est que cette merde, non de dieu ? Ca marchait y’a cinq minutes à peine et j’ai révisé entièrement le moteur ce matin, bordel de chiotte !
Les deux hommes réessayèrent encore deux fois de faire partir le moteur avant de se rendre à l’évidence. Il y avait un problème sous le capot. Le chauffeur demanda :
- Va jeter un oeil  au « delco », tu veux bien ? J’ai pas envi de rester moisir ici longtemps. On a un rendez-vous important ce soir j'te ’rappelle !
- J’y vais. Mais à mon avis t’as autant révisé ce moulin que tes examens de fin d’école, du gland ! Et j’te rappelle que j’aime vraiment pas la campagne alors on fait vite. Ok !
L’homme ouvrit le capot de l’ambulance et s’écria : Bon dieu, d’bon dieu, qu’est ce que c’est que ce merdier ! Viens voir, tu veux ?
- L’autre homme le rejoignit et s’étrangla presque à la vue du moteur.
- Je te jure que ce matin, y’avait rien du tout là-dedans ! C’est quoi cette mousse, non de dieu, un extincteur secret ?
Alors que les deux hommes continuaient de s’engueuler copieusement, leurs pieds s’enfonçaient dans un tapis d’humus bleu, humide et profond qui se développait à grande vitesse autour d’eux. Elle s’attaquait maintenant à grimper le long de leurs jambes. De faibles lueurs argentées parcouraient maintenant cette masse de filaments touffus. C’était comme si un courant électrique alimentait ces fibres végétales, allant et venant à partir de l’arbre majestueux sous lequel se trouvaient les deux hommes.
Les deux hommes étaient loin de s’imaginer qu’il était déjà trop tard pour eux ! Et pendant qu’ils se rejetaient la faute l’un l’autre, ils ne pouvaient concevoir les horribles souffrances qui les attendaient. Même dans leurs ultimes instants ils ne pourraient comprendre qu’ils avaient juste été des jouets de l’histoire séculaire dont ils n’étaient que des pions.
Quand l’emprise de l’étrange mousse luminescente se fit plus importante, les deux hommes réagirent. Enfoncés maintenant jusqu’au genoux dans cette masse qui ne cessait de vouloir les engloutir, ils essayèrent en vain de tout arracher avec leurs mains, leurs pieds et tout ce qui leur était encore accessible. Mais les fibres végétales présentent dans le moteur s’étaient invitées au festin, elle aussi parcourue d’inquiétantes lueurs. Des millions de filaments commençaient à venir s’enrober autour de leurs bras et de leurs torses à une allure prodigieuse, comme autant de serpents.
Les deux hommes tentèrent bien de bouger et d’arracher cette maudite mousse, mais cela ne servait plus à rien. Elles luisaient de mille feux alors que les deux hommes se retrouvaient paralysés. La terreur les envahis quand l’humus pénétra dans leur bouche, les empêchant de respirer en formant e une balle hermétique au fond de leurs gorges.
Moins de deux minutes plus tard, on entendait plus que des cris étouffés, à peine perceptibles. Ces dernières exhortations disparurent très vite. Il ne restait plus qu’un énorme tapis de mousse qui continuait de grossir à une vitesse phénoménale. Une très forte lumière blanche rayonna quelques instant sur l’ensemble de cet épais tapis avant de rejoindre l’arbre recouvrant la scène de ses branches. Et puis, plus rien, tout s’éteignit. Aussi soudainement que le phénomène était apparu. Puis, dans un silence de cathédrale, rien ne bougeant plus dans le bois environnant, l’humus commença à se contracter. Les quelques animaux encore présent aux alentours purent entendre de lugubres craquements qui venaient aussi bien des restes des deux hommes que de l’ambulance qu’on ne discernait même plus tant elle avait été déformée. Le mouvement de contraction des ces fibres végétales s’accéléra tant, qu’il devint impossible à discerner. En moins d’une minute, il ne restait plus rien. Les deux hommes comme l’ambulance avaient été engloutis
Il ne restait plus à voir qu’une épaisse couche de mousse verdâtre au pied d’un arbre majestueux.
Un arbre qu’aucun naturaliste au monde n’aurait pu nommer sans se tromper.

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