lundi 29 novembre 2010

Chapitre 18 suite

Anua et Son agent spécial parvinrent sur place après s'être égarés un bon moment parmi les centaines de chemins de terre qui se multipliaient dans la région.
Ils avaient eu tout le temps de discuter, de se chamailler pour enfin de rire sur la meilleure manière de trouver cette maudite bâtisse. Anua commençait réellement à apprécier la compagnie de Raph.
Raph était désordonné, fallait voir l'intérieur de sa voiture, et toujours distrait, c’était du moins ce qu’il voulait laisser transparaître. Il était en fait parfaitement maître de lui et possédait un sens de l'humour décalé qui la faisait hurler de rire.
Elle avait même cessé de le maudire quant il la taquinait sur ses dons de Madame Soleil. Elle en riait maintenant de bon cœur et comprenait fort bien ses interrogations sur la manière dont elle avait pu repérer l'endroit exact de l'ancien massacre.
Et ce jour là, Anua en remis une couche, en terme de divination !

Juste après avoir pénétré dans la ferme dont il ne subsistait que quelques pans de murs noircis par l'incendie, Anua s'accrocha au bras de son fidèle chevalier servant. D'abord surpris, il se mit à la soutenir par les épaules dès qu'il vit ses yeux clos, ses paupières presque translucides où chaque veine tressaillait à un rythme effréné. A voir la pâleur de son visage et ses traits déformés, c’était reparti pour un tour !
Anua commença par voir une vaste étendue déserte. Après un bon moment où les saisons défilaient à grande vitesse, une ferme flambante neuve sortit de terre, occupée par un jeune couple et trois jeunes enfants style western. Cela se déroulait comme dans un de ces jeux d’arcade, les "Sims" où l'on doit inventer une famille et son environnement puis les faire évoluer virtuellement.
Les scènes se succédaient rapidement devant les yeux d'Anua. Elle passait d'un individu à l'autre à une telle vitesse qu'elle commençait à se sentir comme une balle de ping-pong que se renverraient deux champions chinois qui s'entraînaient pour les jeux olympiques. Les familles se succédèrent jusqu'à une longue période de noir. Visiblement, plus personne n'habitait les lieux. Le paysage s'était modifié. Plus la moindre trace d'arbre. Toute végétation sauvage comme agricoles avaient disparu, preuve que l'on avait exploité cette terre jusqu'à la moelle.
Ce répit dans ce défilé de générations, lui permit de reprendre un peu ses esprits. Elle put  regarder autour d’elle et ausculter minutieusement cette bâtisse. Une pause heureuse de ressenti des peines et joies de la vie de toutes ces personnes à une vitesse qui ne lui permettait aucun répit dans les chocs émotionnels qui se succédaient, se croisaient et finissaient par s’enchevêtrer. Comme l’autre fois quant elle s’était laissée emporter trop loin. Au point de perdre tout contrôle sur sa personnalité. Anua s'était en effet jurée qu'on ne la reprendrait plus l'écume aux lèvres, grattant quoique ce soit avec des objets que seul son esprit tenait, en se mutilant les mains, partie de son corps qu'elle préférait.
La période d'obscurité s'acheva quant un vieil homme, élégamment vêtu, décloua les planches qui obstruaient les fenêtres. Il resta si peu de temps qu'elle n'arriva pas à saisir sa réelle essence. Mais il était visible qu'il ne se sentait pas à l'aise dans cette bâtisse. Son esprit était noir et opaque et ses intentions malveillantes. Elle ressentait le noir lugubre de la ferme après le passage de l’homme. Attente, puis la lumière à nouveau.
Six femmes arrivèrent ensemble dans la maison. Anua les sentit à la fois pleines d'espoir et toujours inquiètes. Elle eut tout le temps, en passant de l'une à l'autre, de ressentir leurs états d'âme ainsi que leurs personnalités. Anua eut tout le temps de s’imprégner de leurs identités respectives, qu'elle s'appliqua à ranger soigneusement dans une partie encore maîtrisable de son cerveau. Elle nota également que ces femmes réunies étaient toujours six. Ces femmes attendaient. Elles étaient en transit dans cette maison.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire