dimanche 21 novembre 2010

Chapitre 15 suite

Pris une nouvelle fois au dépourvu, le jeune homme aux yeux de fauve, était toujours perché en haut la bibliothèque dans un équilibre précaire. Il se passa la main à l’arrière de sa tête jusqu’à ce qu’il se saisisse du cylindre planté dans sa nuque. Il retira délicatement le tube et l’aiguille de son cou et les jeta violemment par terre aux pieds des deux amies, fagotées sue le canapé.
Anua et Billie essayaient tant bien que mal de suivre les événements. Elle en tournaient la tête à l’unisson, de droite à gauche, à chaque mouvement des deux hommes ou objet volant non identifiés, comme des spectatrices assidues d’un match de tennis.
Erick eut le temps de saisir et jeter mollement un dernier livre en direction du géant avant de chuter lourdement par terre, tremblant des pieds à la tête, les yeux révulsés, un filet de bave s’écoulant par les commissures de ses lèvres.
- Voilà, c’est terminé ! Pour lui, c’est le retour au bercail. Malheureusement, il est sûrement  trop tard pour son frère. Il a déjà franchi la limite, il a tué. Et un paquet de gens !

L’homme, nullement gêné par sa grande taille, se pencha vers Erick et s’assura de son état de santé. Rassuré, il se dirigea vers les deux femmes et leur enleva leur bâillon, tirant d’un coup sec sur l’adhésif. Mais pas un cri ne sortit de leur bouche. Elles étaient bien trop choquées pour pouvoir prononcer le moindre mot. C’est lui, au contraire, qui reprit la parole un sourire illuminant enfin son visage :
- Mesdames, dit-il en jetant négligemment sur son épaule le corps du jeune homme secoué de quelques spasmes nerveux, je vais vous laisser pour aujourd’hui. Tenez, je vous laisse le couteau pour pouvoir vous détacher dès que j’aurais quitté l’appartement.
- Ah oui, j’allais oublier ! Anua, je suis désolé, ne compte pas trop revoir ton père. Les monstres qui se sont emparés de lui sont sans pitié. Ils ont du l’abattre juste après l’enregistrement du message qu’ils t’on fait entendre. Je suis désolé de n’avoir rien pu faire pour lui mais je devais te sauver en priorité.
Un silence pesant régna quelques instants, alors que des larmes commençaient de couler sur les joues blafardes d’Anua.
- Il y a des moments dans la vie où l’on aimerait pouvoir se dédoubler, mais ça, je ne peux pas encore le faire ! Je peux pourtant faire beaucoup de choses pour toi, mais ça non ! S’il te plait, ne m’en veux pas. Je sais à quel point tu l’aimais. C’était un homme bien. Va à Westmorland sur la mer de Salton et demande à la police de fouiller le cours d’eau qui longe la ferme des Horgins. C’est là-bas que tu trouveras ton père.

Paraissant sincèrement triste de n'avoir pu faire plus, il se dirigea, cette longue diatribe terminée, vers le trou béant où se trouvait la porte avant l’irruption du complice des meurtriers du père d’Anua.
Le géant vert se retourna une dernière fois. Il fixa un long moment Anua avant de continuer de sa voix gutturale sur un ton qui aurait très bien pu être celui d’un proche réellement touché par la mort de son père :
- On sera amené à se revoir très vite, Anua, « p’tite  frangine ». Je dois d’abord m’occuper de lui, dit-il en tapotant le postérieur de l’homme perché sur son épaule. Il me faut également finir de convaincre quelqu’un que tu seras ravi de revoir, j’en mettrai ma main à couper !
- En attendant que je revienne pour tout t’expliquer, je te conseille de déménager. Pourquoi ne vas-tu pas habiter chez ta copine ? Elle semble à même de t’aider, non ?
Il sourit aimablement à Billie.
-Et t’en faits pas, les mauvaises passes ont toujours une fin.
Sur ces mots le géant, à l’air si nostalgique, disparut trimbalant toujours le corps du kidnappeur comme s’il portait son manteau sur l’épaule en laissant les deux jeunes femmes affalées sur le sofa. Des milliers de questions sans réponses embouteillaient leurs esprits comme une autoroute un jour de départ en vacances.

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